Large de 53 mètres et longue de 3,5 kilomètres, le Kurfürstendamm est l'artère la plus connue de Berlin Ouest. Littéralement l'allée des Princes Electeurs
, le Kurfürstendamm ou Ku'damm fut initialement une route aménégée par le margrave Joachim II en vue de relier le château de Cölln (Stadtschloss) à son Pavillon de chasse de Grunewald (Jagdschloss Grunewald).
A l'initiative de Bismarck, le Kurfürstendamm prit une physionomie urbaine à partir de 1886, et ce dans l'optique de rivaliser avec le Paris haussmannien. Avant la Première Guerre mondiale, le Kurfürstendamm détrona l'avenue Unter den Linden et la Friedrichstrasse en tant que centre de la vie mondaine et nocturne. Des immeubles cossus, de style wilhelmien, bordaient de leurs jardinets le Kurfürstendamm.
Durant les années 1920, les Goldene Zwanziger
, cafés, théâtres, salons de thé huppés et grands cinémas vinrent animer le Kurfürstendamm, pour lui conférer sa renommée internationale.
La Seconde Guerre mondiale mit un terme provisoire aux lustres du Kurfürstendamm. Anénanti par les bombardements et les destructions, le Ku'damm, comme le surnomment les berlinois, devint rapidement la vitrine de Berlin Ouest et du miracle économique de la jeune République fédérale d'Allemagne. En dépit de la concurrence des Linden et de la Friedrichstrasse, fraîchement réhabilitées après la réunification, le Ku'damm conserve son caractère animé et cosmopolite.
En sortant de la jolie station de métro Wittenbergplatz, réalisée par Alfred Grenander en 1911, l'on aperçoit l'immeuble du Kaufhaus des Westens (KaDeWe) érigé en 1906 par Johann Emil Schaudt. Il s'agit du plus important grand magasin d'Europe, après Harrodds à Londres.
La Tauentzienstrasse offre la meilleure vue sur l'Eglise du Souvenir de l'Empereur Guillaume Ier (Kaiser Wilhelm Gedächtniskirche), à travers la sculpture des époux Matschinsky-Denninghoff, intitulée Berlin
. Constituée de tubulures en aluminium, la sculpture célèbre le 750e anniversaire de la ville, encore divisée par le mur de Berlin à l'époque.
A l'approche de la Breitscheidplatz, l'Europa Center, couronné par l'étoile de Mercedes, domine la City de Berlin Ouest de ses 90 mètres.
Achevé en 1965, il constitue un centre commercial et d'affaires avec un hôtel de luxe, près d'une centaine de magasins, des cinémas, des bars, des cafés et de nombreux restaurants. A noter au rez-de-chaussée, l'Horloge du temps qui coule
(Uhr der fliessender Zeit) réalisée par le français Gitton en 1982, que les berlinois surnomment le distributeur de jus de fruit, en raison du liquide fluorescent qui s'écoule.
L'Eglise du Souvenir, la Kaiser-Wilhelm-Gedächtniskirche, est l'un des symboles les plus connus de Berlin. Achevée en 1895, l'église consacrée à l'empereur Guillaume Ier et à la victoire de Sedan fut ravagée en 1943 par les bombardements alliés.
Les édiles décidèrent à la suite d'un débat envenimé et d'un concours d'architecture de ne pas reconstruire l'église, mais de conserver la ruine du clocher et de lui adjoindre un campanile moderne. L'architecte Egon Eiermann remporta le concours et put livrer en 1961 l'audacieux ensemble architectural qui témoigne des destructions de la Seconde Guerre mondiale.
Surnommée la Dent creuse
(Hohler Zahn), la Kaiser Wilhelm Gedächtniskirche est également appelée le Bâton de rouge et le poudrier
, depuis l'adjonction des éléments modernes d'Egon Eiermann.
Même si les derniers combats de rue d'avril 1945 anéantirent de nombreux immeubles bourgeois des Gründerjahre, le Kurfürstendamm compte encore de beaux immeubles de style wilhelmien aux numéros 14, 15, 29, 37, 40, 48, 50, 52, 59, 60, 188, 190, 192, 201, 213, 216 et 218.
En descendant le Kurfürstendamm, trois nouveaux édifices flambants neufs se dressent aux coins de la Joachimsthaler Strasse.
Il s'agit du Ku'damm Eck, un complexe hôtelier et commercial - renouant avec le Berlin des années 1920 - réalisé par gmp von Gerkan Marg et Partner.
L'Hotel Concorde, à la physionomie proche du Flatiron de New-York, fut réalisé par l'architecte berlinois Josef Paul Kleihues.
Le Neues Kranzler Eck fut dessiné par l'architecte germano américain Helmut Jahn, l'auteur du Sony Center de la Potsdamer Platz.
En empruntant la Fasanenstrasse, le promeneur découvre une atmosphère sereine, qui tranche avec la frénésie du Kurfürstendamm. Cette belle rue, constituée de villas et de maisons particulières, accueille de nombreuses boutiques de luxe et galeries d'art. La Villa Grisebach, au n° 25, mérite le coup d'oeil. Au n°24, le Käthe Kollwitz Museum est consacré à l'oeuvre de cette artiste engagée, qui dénonçait la misère de la classe ouvrière de l'entre-deux-guerres. Au n° 23, la Literaturhaus est une villa bourgeoise Gründerzeit, accuillant une librairie et un espace dédié aux expositions temporaires.
Derière le Theater des Westens, le Ludwig Erhard Haus - hébergeant la Bourse et les services de la Chambre de l'insdustrie et du commerce de Berlin - est une réalisation intéressante de l'architecte britannique Nicolas Grimshaw. La configuration difficile du terrain inspira l'architecte à concevoir une structure modulaire reposant sur quinze arcs, donnant à l'édifice la physionomie d'un tatou.
Au carrefour de la Kantstrasse et de la Fasanenstrasse, se dresse l'un des immeubles les plus insolites de Berlin : le Kantdreieck. L'architecte Josef Paul Kleihues imagina une tour de onze étages, coiffée d'une girouette qui comporte un accumulateur de chaleur s'orientant suivant la trajectoire du soleil. L'édifice est consitué d'une aile de cinq étages, toute de verre et d'ardoise, d'allure contemporaine.
De la Kantstrasse, il est possible de poursuivre la promenade vers le quartier universitaire et l'avenue du 17 juin ou celui fort agréable de la Savignyplatz. Les rues ombragées, qui partent en étoile de la Savignyplatz, comptent de beaux immeubles bourgeois Gründerzeit. Ce quartier est riche en librairies, bars et restaurants, avec en toile de fond les arcades rénovées et aménagées de la S-Bahn.